Madame la Présidente,
Monsieur le Rapporteur Général du budget,
Mes chers collègues,
Il convient, dans un tel débat, imposé par la loi, de donner son avis sur les préconisations, les éléments et analyses de ce rapport d’orientations budgétaires, tout autant que de proposer librement pour chacun des groupes qui composent cette assemblée, des solutions et orientations au regard des contraintes financières et des compétences de notre collectivité territoriale.
Mais les limites de cet exercice est qu’il n’en reste qu’à des orientations et que « les choses sérieuses », passez-moi l’expression, se joueront lors du vote du budget.
Voire même de décisions modificatives puisque c’est à l’occasion de D.M., voire de décisions en commission permanente, que votre majorité a décidé la :
– Suppression des ordinateurs dans les collèges alors que nous proposions l’équipement en tablettes numériques de l’ensemble des collégiens du département,
– La suppression de la prime de Noël remplacée hypothétiquement par une prime de 50 euros par enfant,
– La réduction des conditions de la gratuité des transports pour les bénéficiaires du RSA.
Ces décisions en direction des publics les plus fragiles pour l’essentiel mais également de tous les publics pour les ordinateurs peuvent être considérées comme des symboles de votre action en matière sociale.
Votre rapport d’orientations budgétaire fait état de la situation financière du Département et, vous le savez, il est des constats que nous partageons comme celui de la baisse des dotations qui appauvrit les collectivités territoriales et ont un effet pervers sur l’emploi, le développement économique et la mise en œuvre des politiques locales, notamment sociales pour ce qui concerne les département. En ajoutant les manques à gagner en compensation des prestations servies, le retrait du pouvoir fiscal décidé en 2010 avec la suppression de la Taxe Professionnelle ainsi que la mise en place de l’ODEDEL qui va devenir un véritable organigramme des collectivités locales, on est en droit de se demander ce qu’il reste et surtout, ce qu’il restera demain, de la libre administration des collectivités territoriales.
D’autant que l’Etat continue à ne pas honorer ses engagements de compensation des prestations comme c’est le cas pour l’Allocation Personnalisée d’autonomie où la compensation est inférieure de 38% pour un engagement de 50.
Notre budget 2016 sera le premier à être exécuté sous l’empire des lois NOTRe et MAPTAM et donc, de la mise en place de la métropole Aix-Marseille-Provence qui est plutôt en ce moment une métro-pâle, voire une métro-lol comme dirait ma fille…
Néanmoins, notre Département garde des marges suffisantes pour mener à bien ses politiques sans agir avec l’obsession permanente de l’économie et de la réduction de la dépense. Il doit permettre de faire des choix clairs qui ont pour base la compétence première du département « chef de file » en matière d’aide sociale, d’autonomie des personnes et de solidarité des territoires.
Le rôle du Département est d’être un véritable bouclier social pour les populations, de favoriser l’insertion et l’autonomie et d’être un acteur social et politique du territoire.
Pour cela, face aux difficultés, il faut orienter les crédits issus de la clause de compétence générale vers le service public départemental, la solidarité et l’insertion.
S’il est de bonne guerre « d’hurler au loup » sur la situation d’une collectivité territoriale issue de la gestion de ses prédécesseurs, le constat, et le rapport le rappelle à plusieurs reprises, est que le département n’est pas en faillite, qu’il dispose de marges claires et que l’épargne et l’endettement sont à un niveau acceptable. D’ailleurs contrairement à vos affirmations de l’année dernière, il est prévu de faire passer l’endettement au-dessus du milliard d’euros d’ici 2018. Cela conforte ce que nous disions sur le recours à l’emprunt pour desserrer l’étau.
Quelques chiffres : La dette par habitant est de 323 euros dans les Bouches du Rhône pour 825 euros dans les Alpes maritimes, 1 380 euros dans les Hautes Alpes ou encore 810 euros dans le Var… de réelles marges existent.
Nous aurons l’occasion de revenir, lors de l’examen du budget, plus en détail sur la situation financière et les choix mais je dois vous avouer, mes Chers Collègues, que nous avons été pour le moins surpris par l’avant dernière phrase du rapport. Elle semble résumer la philosophie des orientations et nous interpelle fortement, je cite :
« Le travail et le mérite doivent davantage être reconnus et récompensés. Notre politique d’aides doit être mieux ciblée sur les classes moyennes et les familles qui en ont VRAIMENT besoin. »
Sur la première partie de cette phrase, on peut légitimement se demander à qui elle s’adresse : Aux agents et cadres de notre institution ? À d’autres sur qui nous aurions les moyens et le droit de mesurer le mérite ? C’est plutôt étonnant.
Ensuite, orienter les aides vers les classes moyennes pose au moins deux questions.
– A la place des plus défavorisés ?
– Quel type d’aide alors que, par exemple l’équipement en tablette numérique de tous les collégiens du département était effectivement une manière d’aller au-delà des seules catégories socio-économiques les plus faibles ?
Et enfin, « les familles qui en ont vraiment besoin » ?
Depuis 10 mois que vous êtes en responsabilité, vous avez dû vous rendre compte de quelles étaient les familles qui en ont vraiment besoin : dans un pays qui compte 9 millions de pauvres, dans une région où 25 % des salariés gagnent moins de 900 euros par mois, où 50% des retraités perçoivent moins de 1000 euros par mois, où se multiplie la détresse sociale, que les agents de nos MDS rencontrent tous les jours, dans des conditions souvent difficiles. Il ne me semble pas compliqué de savoir qui en a vraiment besoin.
Cela me rappelle qu’il y a quelques mois, lors de la campagne électorale, j’entendais beaucoup parler de fraudes, de profiteurs et autres stigmatisations. Je me rends compte que nous n’en entendons plus parler et que le rapport fait état d’une baisse de 2 000 bénéficiaires du RSA, fruit des contrôles et de l’accès à un parcours d’insertion. Cela nous ferait un taux de « fraudeurs » comme vous les appeliez de 1,70 % ?
Que de bruit pour pas grand-chose car s’il ne faut accepter aucun coup de canif dans le contrat social, ce dont souffrent nos populations en matière d’accès au droit, c’est de moyens supplémentaires dans nos MDS, dans les CAF, les associations d’insertion pour connaître les droits et les devoirs de chacun.
Ce qu’il nous faut, Chers Collègues, si nous voulons agir envers ceux qui en ont le plus besoin, c’est relever le taux de l’APA car cela a de vraies conséquences pour nos séniors et pour l’emploi dans les associations d’aides à la personne qui souffrent de taux trop bas et perdent environ 1 euros par heure d’intervention. Leur seule possibilité de compensation est de recourir aux contrats aidés de façon massive. Renforcer le taux de l’APA, c’est renforcer l’emploi dans le secteur de l’économie sociale et solidaire. Il en est de même pour la PCH en exigeant de l’Etat un relèvement conséquent de cette prestation insuffisante.
Vous déclarez vouloir renforcer le travail d’insertion et redéfinir les priorités. Nous en prenons acte et mesurerons cette volonté aux financements et conventions passées avec les associations d’insertion. Au travers également, des réponses apportées à la situation de nos Maisons de la Solidarité qui sont en première ligne de notre action de chef de file de l’action sociale et de la solidarité.
Pour conclure, et sans penser que Madame la Présidente veuille nous mener à la baguette, j’ai pu voir chez mon boulanger que les dépenses de communication, si souvent décriées lors de la dernière mandature, étaient toujours d’actualité.
Je pense et j’ai toujours pensé que la communication était un axe important d’une collectivité territoriale. Par les temps qui courent, peut-être faudrait-il que la communication d’image soit un peu mise en retrait représentant à la fois une économie substantielle mais également un signe envoyé à nos populations.
Par contre, la communication sur les droits, les outils et les aides de la collectivité est importante dans un pays où les non-perçus de RSA représentent 20 fois plus que les trop perçus.
A cet effet, une information sur la nouvelle prime d’activité qui remplace la Prime pour l’emploi et le RSA activité serait bienvenue tant nos concitoyens méconnaissent la mise en place de cette prime et pourraient ne se rendre compte que la prime pour l’emploi n’existe plus seulement lors de l’arrivée de leur feuille d’imposition ce qui leur ferait perdre 6 mois de prestations. Car seuls les actuels bénéficiaires du RSA activité – dont le taux de recours est de seulement 30 % je le rappelle – sont automatiquement intégrés au dispositif. Les autres doivent faire la démarche auprès de la CAF. L’Etat a provisionné un taux de recours à 50 % seulement.
Une action conjointe avec la CAF, mais également en direction de nos agents me semble opportune puisque cette prime s’adresse aux personnes ayant des revenus inférieurs à 1 500 euros pour une personne seule, 22 000 euros pour un couple et plus pour une famille.
Mes Chers Collègues,
C’est conscient des immenses besoins de nos populations, des contraintes liées aux ressources mais des marges dont nous disposons encore pour y faire face notamment en matière d’emprunt et d’autofinancement, que nous devons faire face à l’impérieuse nécessité d’aller de l’avant dans le champs de nos compétences fondatrices et de l’aide aux communes que nous aborderons ce budget 2016.
Je vous remercie. La Marseillaise-30/01/16