Séance Publique du 9 décembre 2022 – Intervention Audrey Garino
Madame la Présidente,
Mes cher.e.s Collègues,
L’analyse d’un document budgétaire n’a réellement de sens et de portée que si l’on compare la nature et le montant des moyens dédiés au contexte et aux enjeux d’une politique publique.
L’application de ce principe à l’examen du budget primitif 2023 de la délégation PMI et Enfance-Famille est tristement révélateur de votre absence d’ambition et de volonté dans un domaine qui est pourtant une des compétences premières du Département.
Commençons par le constat. Il y a maintenant près de deux ans, la Chambre Régionale des Comptes dressait un bilan très sévère, quasiment un réquisitoire, qui pointait les défaillances des dispositifs de protection de l’enfance piloté par le Conseil Départemental des Bouches-du-Rhône : Saturation de l’offre d’accueil, baisse des aides financières accordées aux enfants et aux familles en situation de grande vulnérabilité, quasi-inexistence des mesures éducatives administratives, engorgement des mesures éducatives judiciaires (AEMO), incapacité de répondre aux mesures de placements à domicile, baisse sensible du nombre d’assistants familiaux…
Un rapport spécifique sur la prise en charge des mineurs non accompagnés pointait, par ailleurs, le non-respect par le Département de ses obligations légales en termes d’accueil et de protection de ces enfants. La CRC précisait notamment que l’absence de moyens et le déficit de pilotage conduisait, je cite, « à un taux de mise à l’abri faible ainsi qu’à l’installation et à la pérennisation des squats ».
Qu’en est-il aujourd’hui de ce diagnostic si sombre ? Malheureusement, aucune amélioration notable n’est constatée, pire la situation se dégrade.
Tous les professionnels vous diront que la situation que nous connaissons n’a que peu d’équivalence dans le temps, que la saturation des dispositifs d’hébergement est telle que chaque nuit, plusieurs dizaines d’enfants, isolés ou avec leurs familles, sont contraints de dormir dans des abris de fortune quand ce n’est pas à la rue. 50 enfants à l’heure où l’on se parle n’ont pas de solution de mise à l’abri à Marseille, 50 enfants.
Les foyers de l’enfance, tout aussi saturés, ne sont pas toujours en mesure d’accueillir les mineurs qui sont confiés au Département par décisions de justice.
Le traitement des Informations Préoccupantes, qui doit permettre d’évaluer la situation des enfants en danger ou susceptibles de l’être, est embolisé par le manque de travailleurs sociaux dédiés à cette mission pourtant prioritaire.
Près de 200 postes d’agents sont aujourd’hui non couverts sur les MDS où les équipes d’encadrement sont quasi-systématiquement incomplètes.
Nous ne pouvons que saluer l’engagement et la volonté des professionnels de la protection de l’enfance, qui, dans un contexte aussi dégradé, poursuivent pourtant leur mission avec une abnégation qui force notre respect et souscrire à leur demande d’assises de la protection de l’enfance.
Face à ce constat, nous pouvions imaginer, je n’ose dire espérer, que l’institution départementale propose un plan ambitieux et volontariste pour enfin répondre à ses obligations et garantir la protection de tous les enfants dont elle a la charge.
Le budget que vous nous présentez aujourd’hui est malheureusement très éloigné de cet objectif. Pire il s’associe à un bilan positif et sans nuance qui pourrait etre risible, si la situation n’était pas si grave.
La très légère augmentation des dépenses de fonctionnement du secteur enfance-famille que vous proposez ne permettra même pas de couvrir les besoins actuels, encore moins l’évolution des demandes.
Avec la crise sociale qui s’installe et se renforce, nous pouvons craindre que les enfants seront toujours plus exposés aux risques et aux dangers. Et le Département, par défaut de moyens et de volonté politique, sera incapable d’y répondre.
Pour toutes ces raisons, nous voterons contre ce rapport.
Je vous remercie,
Seul le prononcé fait foi